L'avis de Pseudo-Mew : "Le thème de ton texte me fait un peu penser au film "Coraline", c'est à dire l'apparition d'un univers parallèle quasi-identique au nôtre par le biais d'un objet du quotidien."
Le bus fît un bruit monstrueux et redémarra avec peine. Quelques secondes plus tard on ne voyait plus que deux faibles lumières au loin. Siri serra un peu plus son écharpe et observa le ciel. Il ne s'arrêtait plus de neiger. La jeune fille empoigna les bretelles de son sac à dos et pris la direction de sa maison, la nuit étant sur le point de tomber il ne fallait pas qu'elle s'attarde. La plupart des rues de la ville étaient calmes à cette heure. Siri rentrait assez tard, le trajet jusqu'à son école prenait un certain temps surtout durant l'hiver. En arrivant devant sa maison elle fît une légère pause en souriant. Au travers de la première fenêtre elle apercevait son père essayant de faire la cuisine. La chaleur de la maison lui fit un bien fou lorsqu'elle pénétra dans le hall.
"-Maman, Papa, je suis rentré !"
Une douce voix de femme retentit du salon,
"-Comment s'est passée ta journée Siri ? Tu as eu des notes ?
-Non, toujours pas ..."
Siri baissa la tête et emprunta l'escalier sur sa droite. En réalité plusieurs contrôles avait déjà été rendu mais elle ne savait que trop bien la réaction de ses parents. La jeune fille ne voulait pas les décevoir une fois de plus. Elle arriva dans le grenier que la famille avait emménagé en chambre. Elle jeta son sac contre le mur et sauta sur son lit. Au dessus d'elle, à travers la fenêtre du toit, on commençait à apercevoir les étoiles. Après un douloureux soupir, Siri s'imagina partir très loin vers une de ces lumières et y découvrir des tas de choses magiques. Elle se redressa et attrapa son journal posé sur son bureau, elle écrivait dedans tout ce qu'elle pouvait imaginer. Sa dernière histoire portait sur un monde qu'elle imaginait derrière son miroir, où toutes les règles classiques ne seraient plus les mêmes. Un monde où l'on marcherait au plafond et où l'on pourrait voler, la neige y serait chaude et les animaux parlerait... Siri se perdit dans son écriture.
Les dernières lumières qui demeuraient dans la ville étaient celles des réverbères sur les trottoirs. Les empruntes et les traces laissées durant la journée commençaient à s'effacer pour laisser place à un froid duvet blanc. A l'intérieur de la maison les parents de Siri s'étaient attablés. Ils commencèrent à discuter,
« -Il faudra bien que notre fille redescende sur terre un jour. Son professeur multiplie les mises en garde, elle ne pourra pas continuer de cette façon.
-Elle a l'âge d'avoir la tête dans les nuages, ça serait dommage de ne pas pouvoir rêver quand on est un enfant, répondit la mère de Siri en souriant légèrement.
-Nous devons être ensemble cette fois, il faut qu'elle comprenne que ses histoires, ses monstres et sa magie ne sont pas réels. »
En haut, dans sa chambre, Siri luttait tant bien que mal contre la fatigue en continuant à griffonner sur son journal. Elle jeta un coup d’œil à son horloge, dix-neuf heures. Elle éteignit sa lampe de bureau et ferma les yeux, la tête posée sur le papier. Il faisait presque entièrement noir.
« -Bonjour Siri ! »
La jeune fille sursauta et chercha à trouver l'interrupteur de la lampe, en vain.
«-Hé ! Du calme, je ne voulais pas te faire peur, pardonne moi ! »
La voix provenait de l'autre coté de la chambre. La jeune fille empoigna son ours en peluche qu'elle serra très fort, elle bégaya légèrement,
« -Qui … Qui êtes-vous ? »
Un petit serpent blanc tacheté de bleu s’avança dans la lumière qui passait légèrement par la fenêtre du toit. Cet être insolite portait un chapeau marron et des lunettes rondes, il revêtait également un petit costume sans manche.
« -Hum Hum... Et bien, je m’appelle Robinson. »
Siri lâcha son ours et se mis à genou pour se rapprocher de Robinson. La peur était partie aussi vite qu'elle était arrivée.
« -Bonjour Robinson, comment connais-tu mon nom ? Et d'où viens-tu ?
-J'ai l'habitude de passer par ici pour aller rendre visite à mon cousin. Je viens de l'autre coté de ton miroir, en te voyant écrire tant de choses à notre sujet je me suis dit que tu voudrais venir voir de tes propres yeux !
-Tu veux dire qu'il existe vraiment quelque chose derrière ?
-Bien sûr ! Tout peut exister, il suffit d'y croire un peu. »
Le serpent regarda la fenêtre et repris la parole,
«-Nous avons besoin de lumière, attrape la boite d'allumette dans la poche de mon costume et allume-en une. Excuse-moi de ne pas m'en occuper mais … Je n'ai pas de bras ! »
Siri s'exécuta et une petite flamme pris place dans la pièce. Robinson glissa jusqu'au grand miroir sur pied du fond de la chambre et sauta dedans après avoir fait un clin d’œil à la jeune fille qui poussa un cri d'étonnement. Puis, elle s'avança jusqu'au miroir et elle tendit la main pour toucher sa surface qui semblait onduler. Après avoir rassemblé son courage, elle sauta. Elle eu l'impression de plonger dans de l'eau mais sans être mouillée. Le monde autour d'elle se déforma pendant un court instant et elle se retrouva dans une parfaite réplique de sa chambre … à l'envers. Devant elle Robinson se trouvait à coté de la fenêtre du plafond, lui souriant. En levant les yeux elle aperçut tous les meubles de sa chambre, comme suspendu en l'air. Le petit serpent s'affaira à ouvrir la fenêtre et invita Siri à le suivre. Enivré par ce début d'aventure elle ne le remarqua pas et pris la parole,
« -Regarde Robinson, l'horloge tourne à l'envers ! C'est comme si le temps remontait !
-Bien sûr, c'est le cas ici. Personne ne vieillit mais rajeunit ! D'ailleurs en tant que jeune personne tu sera très respectée.
-Mais qu'arrive-t'il si on rajeunit trop ?
-Et bien, tu reviens exactement à l'âge où tu es arrivée ! J'en suis moi-même à mon troisième cycle. »
Rassurée, Siri s'avança. Le ciel s'ouvrait en dessus d'elle, les étoiles semblaient l'inviter à sauter et à venir danser à leurs côtés.
« -Ce n'est pas dangereux ?
-Bien sûr que non ! »
Siri flottait dans les airs, elle n'avait qu'a penser et donner l'impulsion pour voyager rapidement d'un bout à l'autre du monde. La neige émanait des étoiles qui s'étendaient en dessous d'elle. Les flocons venait se poser sur elle, réchauffant son visage. Elle riait au éclat. Elle regarda au dessus d'elle et aperçut sa maison et la fenêtre de sa chambre. Robinson lui faisait signe de la tête en souriant. Il semblait essayer de lui dire quelque chose. La jeune fille s'approcha de lui.
« -A table !
-Quoi !? »
Le paysage s'obscurcit et ondula comme si tout était sur le point de s'éclater. La tête de Siri tourna et elle n'arrive plus à parler ou à bouger. Le ciel se renversa et les flocons commencèrent à disparaître.
« - … table ! »
Elle sentit sur sa joue la sensation sec et rêche du papier. Elle ouvrit difficilement les yeux sur sa chambre, sa chambre normale, et comprit qu'elle s'était endormie. La voix de sa mère retentit une fois de plus,
« -Siri, on mange ! »
La jeune fille se précipita vers l'escalier en criant,
« -Maman, Papa, j'ai fait un rêve formidable ! »
Elle revînt rapidement fermer la porte de sa chambre en y jetant un dernier coup d’œil. Rien n'avait changé. Elle espérait pourtant voir la drôle de tête de Robinson à travers le miroir. La neige avait fini de recouvrir complètement la fenêtre et le dernier rayon de lumière disparu. Siri n'eut pas le temps d’apercevoir son horloge dont la petite aiguille indiquait le chiffre cinq.